23 novembre 2020
Des nouvelles du projet Prévention Environnement Patients Soignants – PEPS
PEPS !
C’est le petit nom d’une expérimentation pionnière menée par votre Union Régionale des Chirurgiens-Dentistes Libéraux de Bretagne – URPS CDLB en 2019-2020. Son objectif : proposer à plusieurs cabinets un accompagnement à la mise en œuvre d’une démarche écoresponsable personnalisée et d’amélioration continue.
Protection de l’environnement, protection de la santé
En effet, favoriser l’écoconception des soins est une démarche gagnant-gagnant face aux graves crises actuelles (écologiques et sanitaires), répondant aux quatre enjeux suivants : la protection de la santé de l’équipe soignante, celle des patients, celle de l’environnement et ainsi, la santé des générations futures.
Scénario de l’action
8 volontaires « Praticiens et Cabinets Pilotes » (PCP) ont été recrutés pour relever le défi d’intégrer à leurs pratiques des gestes et réflexions propres à maîtriser l’impact environnemental de leurs cabinets en réduisant les pollutions, les émissions de gaz à effet de serre (GES) ou encore le gaspillage des ressources.
Après un temps de sensibilisation collective et d’échanges entre les praticiens, chacun des PCP a bénéficié d’une évaluation personnalisée de ses pratiques (impact écologique et santé au travail). Ils se sont alors fixés quelques objectifs atteignables relatifs aux thèmes auxquels ils étaient les plus sensibles parmi les suivants :
- Sobriété énergétique ;
- Démarche d’achat responsable ;
- Maîtrise de la qualité de l’air intérieur ;
- Gestion de l’eau ;
- Gestion des déchets ;
- Ou encore management et communication à développer pour porter la démarche.
L’URPS CDLB a pris financièrement en charge les audits et l’accompagnement ; les PCP n’ont pas été tenus d’avoir un budget dédié pendant la période.
100 % des participants ont réduit leur impact écologique
L’écueil à éviter était la mise en place de gestes peu pérennes. Ainsi, une grille d’auto-évaluation sur 60 critères environnementaux et un référentiel ont été mis à leur disposition pour qu’ils se situent sur un Avant / Après. Ils ont ainsi reçu des fiches pratiques (sur la qualité de l’air intérieur, la gestion des déchets, l’étiquetage des produits toxiques, …) et des conseils adaptés.
Après plus de 6 mois d’accompagnement, les audits finaux de chaque cabinet ont permis d’établir un bilan positif pour tous les praticiens.
L’objectif global n’était pas un utopiste « cabinet zéro impact » mais une réduction de l’empreinte écologique s’inscrivant dans la durée, au-delà du temps du projet. Ainsi, après l’accompagnement, les praticiens devaient se sentir libres et prêts à se fixer de nouveaux objectifs à atteindre.
Figure 1 : Compilation des résultats des autoévaluations pour chaque thématique du projet PEPS – Evolution entre septembre 2019 et avril 2020 – Global sur l’ensemble des PCP
Bilan des freins et leviers pour d’autres actions
Les témoignages des praticiens pilotes (voir encadrés en dessous) illustrent les freins et leviers pour développer la démarche PEPS à d’autres cabinets :
- Une nécessaire implication de l’équipe, grâce à la prise de conscience du sens de la démarche plus que des contraintes qui pourraient y être associées ;
- Le prérequis est l’assurance de la qualité et de la sécurité des soins, mais celles-ci doivent s’inscrire dans la durabilité du cabinet et la « durabilité de l’équipe soignante », et non plus au détriment de l’environnement ;
- Au-delà des soignants, un engagement de tous les acteurs de la profession est indispensable. Il permettra une évolution des recommandations professionnelles, telles qu’une réflexion sur le « tout usage unique », la désinfection zéro-chimie ou le développement de produits de santé et équipements plus écologiques sans greenwashing.
Témoignages des volontaires PCP
Dr J. BRUCHIER exerce à Saint Brieuc (22) en collaboration, avec 2 assistantes dentaires
On peut dire que cette démarche nous a confortés dans notre volonté d’être le plus écoresponsable possible, et que paradoxalement les mesures sanitaires imposées nous ont fait faire un grand bond en avant puisque nous n’utilisons plus de gobelets jetables et beaucoup moins de serviettes jetables.
C’est déjà un bon point.On avance ensemble !
Dr M. GENDRONNEAU exerce à Saint Etienne en Cogles (35) en collaboration, avec 2 assistantes dentaires
Quelles étaient vos motivations pour participer à ce projet ?
Nous avons participé car nous souhaitions réfléchir à nos consommations et à leurs impacts sur notre santé et notre environnement. Ce projet permettait également d’avoir un objectif commun pour l’ensemble de l’équipe de notre cabinet dentaire et ainsi renforcer l’esprit d’équipe (et permettre le bien-être au travail).
La mise en place d’une démarche environnementale présente-t-elle un intérêt pour un chirurgien-dentiste ? Est-ce vraiment son rôle ?
En tant que chef d’entreprise, c’est le rôle du chirurgien-dentiste de s’y intéresser.
En tant que professionnel de santé, c’est également son rôle de s’y intéresser.
En tant qu’être humain sur cette Terre, c’est aussi son rôle de s’y intéresser.
Qu’est-ce qui a été simple à mettre en place ? Qu’est-ce qui vous semble plus difficile ?
Mettre en place de petits changements au fur et à mesure, ce n’est pas difficile. Par exemple, il est très facile de s’organiser en cassettes, en rendez-vous long, de maximiser le nombre de soins sous digues, de terminer les soins par une photopolymérisation sous glycérine, de supprimer les lingettes, les gobelets plastiques, d’aérer suffisamment les locaux, de veiller à éteindre les lumières…
Il est plus difficile d’investir dans des produits dits écoresponsables qui sont onéreux, d’obtenir toutes les fiches de données de sécurité (FDS) ainsi que d’avoir le temps de toutes les lire et les comprendre. Mais le plus difficile pour nous est de réussir à rendre acteurs l’ensemble des membres de notre équipe dans cette action. Car lorsque quelqu’un ne s’intéresse pas au projet, il ne peut pas changer ses habitudes et chercher une amélioration.
Quel « écogeste » mis en place, changement de pratique ou objectif atteint vous a rendu le plus fier, votre équipe et vous ?
Je suis fière d’avoir pu mettre en place, petit à petit, un certain nombre de petits gestes susceptibles d’améliorer notre santé environnementale et notre impact écologique : attention particulière à l’éclairage et au chauffage, suppression des lingettes, des gobelets plastiques, rationalisation des commandes (mais ce n’est pas encore abouti), …
Cependant, actuellement, je ne suis pas fière : depuis la reprise, nous n’avons plus vraiment le temps de réfléchir à de nouvelles actions pour continuer d’évoluer.
Dr J-F. AMBARD exerce à Plérin (22) avec une assistante dentaire
Quelles étaient vos motivations pour participer à ce projet ?
Faire une évaluation de ses propres pratiques à l’aide d’un autre chirurgien-dentiste, et non avec un théoricien ou technocrate.
La mise en place d’une démarche environnementale présente-t-elle un intérêt pour un chirurgien-dentiste ? Est-ce vraiment son rôle ?
L’intérêt, c’est de moins dégrader l’environnement général et éventuellement d’améliorer son environnement local et professionnel.
Dans l’absolu, la démarche écoresponsable devrait s’appliquer à tous les citoyens et donc aux praticiens.
Qu’est-ce qui a été simple à mettre en place ? Qu’est-ce qui vous semble plus difficile ?
Le plus simple : remplacer les gobelets en plastique par du métal et supprimer les plateaux en plastique jetable. Le plus difficile : faire changer les habitudes et convaincre de ne pas sur-stériliser.
Quel « écogeste » mis en place, changement de pratique ou objectif atteint vous a rendu le plus fier, votre équipe et vous ?
C’est la remise vraiment au carré de la chaîne de stérilisation et la diminution du gaspillage.
Dr N. NOUVIALE exerce à Baulon (35) en collaboration, avec une assistante dentaire
Quelles étaient vos motivations pour participer à ce projet ?
La motivation vient d’une non concordance entre ma vie privée où je suis assez engagée dans la réduction des déchets, les achats responsables, etc. et la vie professionnelle dans laquelle la démarche me semblait plus compliquée à mettre en œuvre car beaucoup de jetable.
Qu’est ce qui a été simple à mettre en place ? qu’est-ce qui vous semble plus difficile ?
– Ce qui a été simple : penser à des petits gestes comme éteindre ce qui peut l’être le soir, aérer pour renouveler l’air ambiant, garder un œil sur les consommations d’eau et d’électricité, choisir des machines basse consommation pour l’entretien du linge.
– Ce qui est plus compliqué : choisir des consommables plus écoresponsables, car il est parfois difficile de savoir s’ils le sont vraiment et j’ai tendance à privilégier les produits qui sont « reconnus » en termes de résultats. Heureusement, il semble que les industriels deviennent vigilants sur ce critère eux-aussi. Limiter le volume des poubelles est également compliqué car notre profession implique beaucoup de jetable pour pouvoir respecter les normes d’hygiène.
Quel « écogeste » mis en place, changement de pratique ou objectif atteint vous a rendu le plus fier, votre équipe et vous ?
Tout simplement l’aération de notre cabinet, car je n’imaginais pas que la pollution de notre air intérieur pouvait être aussi forte, et faire attention à ma santé et à celle de notre équipe me semble primordial. Bien sûr, cette mesure prend encore plus de sens avec l’épidémie de la Covid-19 mais nous avions déjà intégré cette pratique à nos protocoles d’entretien suite à la réunion d’information du projet dès septembre 2019, starter de l’accompagnement par le Dr Baras et l’URPS CDLB.
L’Union Régionale des Chirurgiens-Dentistes Libéraux de Bretagne est fière d’avoir proposé ce projet à des volontaires bretons, qui ont ouvert la voie à leurs confrères. Bravo à eux !
Dans la lignée de ce projet, l’URPS CDLB souhaite que de nombreux chirurgiens-dentistes aient envie de se lancer dans leur propre démarche écoresponsable. Les praticiens de Bretagne ont montré leurs attentes et leurs motivations. Courage à toutes et tous !
Dr Alice BARAS, réalisatrice du projet PEPS,
Chirurgien-dentiste spécialisée en management du développement durable en santé, médecine environnementale et management de la qualité en odontologie ;
en collaboration avec l’URPS CDLB.